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Laurence Parisot ne fait pas la différence entre les maux et les mots… 63 auteurs lui expliquent

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Salaire des grands patrons : Laurence Parisot propose de faire les poches des écrivains

Ancienne présidente du Medef et actuelle vice-présidente de l’IFOP, Laurence Parisot a publié dans Libération, le 19 mai, une tribune expliquant pourquoi elle n’a pas signé l’appel à limiter la rémunération des patrons du CAC 40. Elle décrète injuste le procédé, précisant que « un cadre dirigeant d’une entreprise non cotée et qui gagne 10 millions d’euros passerait sous le radar ; un artiste qui gagne 20 millions par an et qui utilise tout au long de l’année sans vergogne les services d’intermittents ne serait pas concerné ; un écrivain à succès qui empoche 1,8 million de droits d’auteur et qui ne fait travailler personne ne serait pas concerné ; etc. »

Au-delà du caractère haineux et vulgaire du terme « empocher », cette affirmation inexacte est révélatrice d’une pensée qui n’est jamais formulée clairement mais qui est hélas très répandue jusque dans ce secteur de l’activité économique qu’est, n’en déplaise à Madame Parisot, l’industrie du  livre, et particulièrement chez les dirigeants de groupes d’édition et de chaînes de librairies : pour ces vrais-gens-qui-font-travailler-les-autres, l’écrivain n’est pas un acteur économique, ses prétentions à l’être sont au mieux risibles.

Si l’écrivain à succès ne fait travailler personne, que dire des autres en effet ?

Rappelons à Mme Parisot que la « chaîne du livre» représente 3,9 milliards d’euros de chiffres d’affaire en 2015, et 80.000 emplois sur les 430.000 de l’ensemble du secteur culturel – écrivains non compris, évidemment, qui ne sauraient être considérés comme des acteurs économiques.

D’après le ministère de la Culture et de la communication, la répartition moyenne du prix d’un livre est la suivante : 36% vont au libraire, 21% à l’édition en sus des 15% dédiés à la fabrication, 20 % à la distribution et diffusion (entreprises liées ou appartenant aux groupes d’édition) et 8 % à l’auteur.

8% en moyenne, car il est évident que l’auteur de bestseller n’a aucun mal à négocier 16 ou 18 % de droits entre gens de bonne compagnie, quand l’auteur de poésie (celui qui, peut-être, sera étudié dans les lycées en 2080…) peine à obtenir 6 %.

En réalité, de très nombreux auteurs ne touchent … rien, ou presque, parfois 1000 euros d’à-valoir pour l’écriture d’un livre, et pas seulement dans les petites maisons d’édition dont les éditeurs trop passionnés pour être des acteurs économiques sérieux ne parviennent pas à se payer eux-mêmes (du moins ces derniers font-ils travailler imprimeurs, diffuseurs, etc…).

Si la situation de la majorité des auteurs s’est brutalement dégradée ces dernières années, et si l’écart se creuse chaque mois entre les quelques bestsellers qui se vendent plus que jamais (qu’ils soient bons ou mauvais) et la plupart des livres de littérature, qui se vendent de moins en moins (qu’ils soient bons ou mauvais),  ce n’est pas le fait du hasard, mais de la rationalisation économique de la chaîne du livre mise en oeuvre par les dirigeants de l’édition et du commerce culturel, précisément au nom de la logique comptable défendue par Mme Parisot, contre laquelle luttent heureusement nombre de libraires indépendants : du strict point de vue des indicateurs économiques, il est bien plus rentable de vendre cent fois le même titre que cent titres différents.

Cette rationalisation économique qui réduit le livre à un statut d’objet de consommation et l’auteur à la brutalité de ses chiffres de vente, est suicidaire à long terme.

Que devient l’écrivain, au fond, dans un monde où la valeur des êtres et des choses se réduit aux seuls critères marchands, un monde où celui qui ne s’inscrit pas dans les rapports de domination et de servitude n’existe pas ? Les oeuvres de Dante, Montaigne, Cervantes et de la marquise de Sévigné donnent du travail longtemps après la mort de leur auteur : ce n’est pas une raison pour considérer, comme Madame Parisot et ses pairs que l’écrivain vivant n’est qu’un ornement de salon, qui n’a besoin ni de manger ni de se loger, et en conséquence « empoche » indûment la juste reconnaissance de son travail…

Pourtant, ce qui restera de notre époque, est précisément ce qu’auront produit les artistes « sans vergogne » et les écrivains sans « travail ».

Il y a des jours où, grâce à vous, Madame Parisot, l’écrivain, dans sa solitude habitée, est heureux de ne pas être un « acteur économique » et de se savoir un « prix » qui n’est pas indexé à l’échelle de vos non-valeurs.

Bertrand Leclair, Pascale Fautrier, Camille Laurens, Annie Ernaux, Arnaud Viviant, Olivier Steiner, Philippe Torreton, Pierre Lemaitre, Carole Zalberg, Valère Staraselski, Guillaume Chérel, Belinda Cannone, Dominique Conil, Vincent Message, Caroline Hoctan, Cloé Korman, Christine Fizscher, Christian Limousin, Yves Bichet, Arno Bertina, Geneviève Brisac, Sylvaine Jaoui, Didier Peyrat, Marianne Alphant, Frédérique Clémençon, Anne Savelli, Renaud Ego, Yves Nilly, Laurence Nobécourt, Marie-Hélène Dumas, Thomas Clerc, Laurent Grisel, Jean Rouaud, Michel Surya, Marie Cosnay, Jean-Jacques Salgon, Dominique Sigaud, Céline Curiol, Gérard Mordillat, Jean-Michel Espitallier, Nathalie Kuperman, Astrid Waliszek, Alice de Poncheville, Françoise Morvan, Mathieu Larnaudie, André Markowicz,  Anne-Marie Garat, Alexandre Bergamini, Eric Pessan, Jean-Yves Mollier, Hélène Cixous, Lydie Salvayre, Sophie Képès, Isabelle Floch, Nathalie Peyrebonne, Pierrette Fleutiaux, Thierry Beinstingel, Emmanuel Ruben, Cécile Wajsbrot, Tiffany Tavernier, Olivier Barbarant, Nedim Gursel, Gloria Origgi.

Pour signer à votre tour ce texte, c’est ici !

Texte © Les auteurs & L’Humanité – Photo © DR

Et pour aider Laurence Parisot à se faire une idée plus approfondie quant à cette différence entre les maux et les mots, DF lui propose la lecture de ces articles éclairants :
Madame Parisot : à quand des camps de travail pour ces fainéants d’écrivains ? par Pascale Fautrier.
Écrivain, une profession de foi, par Camille Laurens.
Les écrivains sont pauvres, et plus encore les femmes, par Nicolas Chevassus-au-Louis.


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